Un moment suspendu
Début juillet, mon premier festival, la première fois que Werchter est sans son Torhout. Nous sommes un groupe d’amis, enfin étions car je suis seul, je les ai perdu. J’ai arrêté de les chercher, de toute manière, cela ne sert à rien avec tant de monde ; on finira par se retrouver. L’après-midi est déjà avancée mais le soleil est encore chaud, trop chaud à mon goût. Je ne sens plus mes pieds, je ne sens plus mes oreilles, je suis comme transporté dans un monde à part. Je tape sur l’épaule de celui qui est devant moi et je décolle ; passe de main en main porté par la foule. Je débarque au pied de la scène et suis évacué sur le côté. Là, au pied du mur d’enceintes, quelques personnes sont assises. Je les rejoins, m’adosse à ce monstre de près de trois étages. Radiohead enchaine les morceaux, mon corps entier vibre à leur rythme. Le soleil, la musique, la chaleur, la fatigue… Le temps semble suspendu, seul l’instant présent existe. Quand tu arrives, il n’y a plus de place pour t’installer. Tu te frayes un chemin dans la foule et viens t’assoir juste devant moi. Tu te laisses aller en arrière et t’appuies sur mes genoux relevés, comme si nous connaissions depuis toujours. Tes cheveux blonds brillent au soleil. Tu te retournes, regardes ton dossier improvisé et lui souris. Moi je fonds. Bientôt, tu es allongée, ta tête reposant sur mon torse. L’odeur de tes cheveux me parvient ; de la camomille, je crois. Combien de temps sommes-nous restés ainsi, sans bouger, bercé par la musique ? Le concert s’est terminé, la magie s’est rompue. Tu t’es levé, es partie rejoindre je ne sais qui. Je n’ai jamais rien connu de toi si ce n’est tout sourire, tes cheveux blonds qui sentaient la camomille et le poids de ta tête sur mon torse mais encore maintenant, des années plus tard, je me souviens de cette rencontre magique.
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